La passation de contrats administratifs

 

Une des parties est une personne publique donc elle a des règles de compétences décisionnelles à respecter sinon le contrat est nul de nullité absolue. Le juge lève d’office le moyen tiré de l’incompétence.

En droit privé le nullité du contrat n’est pas absolue mais seulement souvent relative, théorie de l’apparence.

Ces règles de compétences concernent les contrats administratifs et les contrats privés de l’administration.

Très souvent le contenu du contrat à signer est plus ou moins prédéterminé par les textes. Limitation de la liberté contractuelle.

§ I. Les règles de compétences.

L’autorité doit avoir deux compétences :

Ex : le parc des schtroumfs est sur le territoire du syndicat de communes de La Gravelotte. Le parc a besoin d’eau et passe un contrat avec le réseau d’une commune limitrophe du parc et du syndicat de communes. Le CE annule le contrat.

A. La compétence de la personne publique.

    1. Collectivité locale et établissement public.
    2. Une collectivité locale soit a créé un établissement public local, soit a adhéré à un EPCI. Principe d’exclusivité, quand la commune a transféré ses compétences elle est dessaisie. Problème car les transferts de compétences opérés par la commune peuvent être partiels :

      • Géographiquement : juste pour une partie du territoire de la commune
      • Matériellement : juste le captage-traitement ou le transport ou la distribution de l’eau.

    Depuis 1985 on a une décentralisation de l’enseignement secondaire, la gestion des collèges revient au département et la gestion des lycées revient à la région. Les collèges et les lycées sont des Etablissements Publics Locaux d’Enseignement (EPLE). Principe de répartition des compétences complexes.

    Le département de l’Essonne a fait un appel d’offre pour le chauffage de tous ses collèges. Il y a un recours contre qui dénonce l’incompétence du département pour les contrats concernant le fonctionnement des EPLE (compétence de l’EPLE lui-même en principe).

    CE, 02/06/95, COFRETH : le CE établie une distinction selon le contenu du contrat :

    Dans le premier cas c’est le département qui est compétent car il s’agit de travaux concernant le bien immobilier et donc c’est le propriétaire, le département qui est compétent. Dans le second cas c’est l’EPLE qui est compétent car c’est du pur fonctionnement.

    C’est un arrêt unique car il dit " à défaut d’avoir reçu mandat du Conseil d’administration du collège ", par un mandat une collectivité locale pourrait déroger à la répartition législative des compétences !

      1. Le transfert de compétences.
      2. Une commune a conclu un contrat pour la gestion d’un service et ce service est transféré à en EPCI en cours de contrat.

        Création d’une nouvelle commune (c’est rare et peu encouragé) : les contrats suivent la compétence. Il n’y a pas du fait du changement de collectivité locale compétente de disparition des contrats en cours.

      3. La coopération décentralisée.

    Contrats conclu entre les collectivités locales françaises avec des collectivités locales étrangères : gestion des remonte-pentes des pyrénées.

    Problème doctrinal car l’idée est répandue que l’Etat a le monopole des relations étrangères. Le législateur a voulu limiter la compétence des collectivités locales : Loi du 02/03/82 qui ne permet la coopération décentralisée qu’au niveau des régions et pour les communes justes les actions transfrontalières.

    Extension progressive avec la loi ATR, loi Joxe du 06/02/92 qui retire la condition de transfrontaliarité. Il y a eu un débat à l’Assemblée, certains députés ont trouvé le texte trop large car il y a des possibilité d’interférence avec les relations diplomatiques de l’Etat. 

    Loi du 04/02/95 conserve la solution antérieure, art. L 1112-1 CGCTLes collectivités locales peuvent librement conclure des conventions ave des collectivités locales étrangères ", mais art. L 1112-5 CGCL " aucune convention de quelque nature qu’elle soit ne peut être passée entre une collectivité locale et un Etat étranger ".

    B. La compétence de la personne publique.

      1. Etat et établissements publics autres que territoriaux.

     

     

     

     

     

     

    2. Les collectivités locales.

    A l’intérieur des règles générales il y a des règles particulières à certaines collectivités locales. Les établissements publics locaux dépendants de ces collectivités locales sont concernés par ces mêmes règles.

    Objet : introduire dans tous les contrats une certaine transparence et une certaine garantie d’impartialité.

      1. Le processus de décision.
      2. Le consentement de la collectivité locale est exprimé par l’assemblée délibérante qui approuve le contrat. La décision du conseil est ensuite exécutée par le maire (exécutif local) qui signe le contrat. Ces deux étapes sont exigées.

        Le contrôle de légalité. La liberté contractuelle des collectivités locales doit faire l’objet d’un contrôle par les autorités garantes de l’unité nationale et du respect de la loi.

        Avant 1982 pour les contrats les plus importants (marchés publics, emprunt) il y avait une formalité d’approbation par le préfet ou le ministre selon l’importance. Cette intervention intervenait a posteriori. On avait une dérogation au principe de la non-rétroactivité, l’approbation rétroagissait. Cependant cette approbation n’était qu’une condition d’opposabilité du contrat, une condition de perfection et non de validité du contrat. Le préfet pouvait refuser son approbation pour des raisons d’opportunité et non seulement de régularité.

        Après la loi de 1982 on substitue le contrôle de légalité à l’approbation. On transmet le document juridique au représentant de l’Etat. L’Etat ne fait que vérifier la conformité des décisions au droit. La transmission a un effet automatique, elle conditionne le caractère exécutoire de l’acte.

        Si la signature du contrat a lieu avant la transmission il y a nullité absolue du contrat car le maire n’était pas compétent pour signer : CE, 20/01/89, VILLE DE MILLAU.

        Problème d’application : les collectivités locales pour beaucoup ont conservé leurs habitudes d’avant 1982 et elles continuent à signer en premier et à envoyer après. L’information n’a été assurée que par l’arrêt du CE, 10/06/96, PREFET DE LA CÔTE D’OR qui a donné lieu à un avis contentieux avec une circulaire du ministère de l’Intérieur et les collectivités locales ont enfin intégré le changement.

        Aujourd'hui les collectivités locales font attention à la chronologie, les usagers/ contribuables peuvent sinon remettre leurs actes en cause : CE, 29/10/00, SOCIETE CITECABLE.

        L’assemblée délibérante peut dans certains cas donner délégation. Il faut une délibération générale pour autoriser le contrat et le signer. L’exécutif se substitue à l’assemblée délibérante. Il faut qu’un texte autorise la délégation et que la décision autorisant la délégation soit publiée.

        Art. L 2122-22 CGCT permet au conseil municipal de déléguer au maire dans certains cas.

      3. Droits et obligations des élus.

    Textes visant à renforcer la compétence des élus pour certains contrats. Art. L 2121-12 CGCT : quand le contrat soumis à l’assemblée délibérante est un marché public ou une délégation de service public le projet de contrat doit pouvoir être consulté à l’avance dans les conditions du règlement intérieur.

    Art. L 1411-9 CGCT : en matière de délégation de service public tous les documents doivent être tenus à la disposition des élus 15 jours à l’avance.

    Garantie d’impartialité. Empêcher que les élus usent de leur influence pour avantager un cocontractant déterminé. Il y a trois règles :

    § II. La détermination des clauses du contrat.

    Le contrat administratif contient le plus souvent des clauses spécifiques. C’est en général un contrat écrit mais il peut aussi s’agir d’un contrat verbal ou tacite (reconduction tacite). Souvent les textes imposent la forme écrite : marchés publics, délégation de service public.

    Exemple de contrat purement verbal, CE, 20/04/56, EPOUX BERTIN.

    Quand le contrat est écrit le contenu des clauses est déterminé par la volonté des parties et on ne peut pas aller plus loin ou moins loin que ce qu’elles ont décidé (comme en droit privé). Le juge administratif est parfois plus audacieux que le juge judiciaire concernant notamment les indices de variation des prix. Si l’indice de référence pour le prix qui a été choisi par les parties n’est plus calculé le juge administratif peut librement choisir un autre indice se rapprochant le plus possible de l’ancien indice et le lui substituer.

        1. Les documents-types.

    Ce sont des documents qui constituent des contrats pré-rédigés auxquels les parties selon les cas peuvent ou doivent faire référence pour les transformer en contrat.

    On a des cahiers de charges-types dans trois principaux domaines : marchés publics, délégation de service public et occupation du domaine public.

    En droit privé on trouve aussi des contrats-types (droit des assurances) mais ils sont quantitativement moins importants qu’en droit public.

    Les documents-types permettent d’uniformiser les contrats conclu par les différents services de l’Etat. Ces documents ont permis à l’Etat d’exercer un contrôle sur les collectivités locales (instrument de tutelle).

      1. Les catégories de documents-types.
      2. Il existe trois catégories :

        Les documents-types approuvés par décret :

        Ce sont les Cahiers des Clauses Administratives Générales (CCAG) applicables notamment aux marchés publics : travaux, fournitures courantes et services, prestations intellectuelles, marchés industriels.

        On a un décret qui préindique clairement que les CCAG annexés s’appliquent aux contrats qui s’y réfèrent. Ex : CCAG des concessions d’aéroports.

        Les documents-types approuvés par circulaire ministérielle.

        Une circulaire approuve un modèle pour la gestion de services publics, service public par service public. Pour le recrutement d’agents dans les services diplomatiques à l’étranger. Pour les mise à disposition des collectivités locales des services de l’Etat.

        Les documents-types informels.

        Ces documents-types ne sont pas annexés à un document officiel. En général les représentants d’une profession et de l’administration se réunissent pour mettre au point un modèle de contrat dans un domaine où l’administration doit passer beaucoup de contrats. Ainsi EDF a mis en place un groupe de travail (représentants d’EDF, des collectivités locales, du ministère de l’industrie, de la fédération nationale des collectivités concédantes et des régions, de l’association des maires de France…) pour élaborer un contrat-type de distribution d’électricité. On retrouve la même chose pour les contrat d’affermage d’eau potable.

      3. Portée juridique des documents-types.
      4. Les documents-types approuvés par circulaires et les documents-types informels ne sont jamais obligatoires. Le problème concerne les documents-types approuvés par décret.

        • Régime juridique de l’acte d’approbation. Le statut du décret : c’est un acte administratif réglementaire faisant grief susceptible de recours. A l’appui de ce recours on peut invoquer l’illégalité des clauses du décret, CE, 05/05/61, VILLE DE LYON : recevabilité du recours contre un décret approuvant un cahier des charges de la distribution de gaz. Cependant le CCAG approuvé par décret n’a pas la valeur juridique d’un décret. L’assimilation à un acte administratif réglementaire ne fonctionne que pour la possibilité de recours, le CCAG n’a pas forcément valeur obligatoire.
        • Régime juridique des clauses-types : les marchés conclus dans des domaines où il y a des clauses expresses de renvoi a un CCAG sont-ils obligés d’y être conformes ? Il y a deux formes d’obligation :

        • Les CCAG s’appliquent automatiquement, acte-condition.
        • Les CCAG ne s’appliquent que s’il y a une clause expresse de renvoi au CCAG dans le contrat. Ces CCAG obligatoires signifieraient que les parties ont l’obligation de se référer aux CCAG sous peine de nullité.

      Pendant longtemps la référence au CCAG approuvé par décret a été obligatoire : pour les services de l’Etat c’est obligatoire, pour les collectivités locales jusqu’en 1982 il était admis que leurs marchés publics et leurs concessions devaient être conformes mais avec une possibilité de dérogation (dans ce cas approbation du ministre et non du préfet), puis en 1982 suppression de la tutelle l’art. 13 de la loi du 22/07/82 pose que les CCAG ne sont que des modèles de contrat (comme ceux approuvés par circulaire).

      Les décrets approuvant les CCAG prévoient leur caractère obligatoire pour l’Etat mais le juge administratif n’a jamais admis la nullité du contrat non conforme au CCAG. Simple possibilité de sanction disciplinaire sur la fonctionnaire qui n’a pas appliquer la conformité.

      En pratique la quasi-totalité des marchés se réfèrent aux CCAG.

       

       

       

       

      B. Les règles générales relatives au contenu du contrat.

        1. Les éléments essentiels du contrat. 
        2. On applique en droit administratif la règle générale selon laquelle pour qu’un contrat existe il doit indiquer un objet, une durée et un prix (ou les éléments permettant de le définir ultérieurement de façon définitive).

          Pour que le contrat soit valable il lui faut une cause licite. Application rare en droit public. CE, 25/11/21, SAVONNERIE OLIVE : nullité du contrat entre la savonnerie et l’Etat par lequel l’Etat accordait à l’entreprise le droit d’importer des matières premières en contrepartie d’une redevance. Selon le CE la vénalité des actes administratifs entraîne la nullité du contrat car la clause est illicite.

        3. Les textes particuliers.

      Des textes peuvent imposer un certain contenu au contrat.

      Les clauses obligatoires imposées par la loi :

      Certains contrats doivent, à peine de nullité, comporter des clauses énumérées par la loi. Ex : Loi du 07/07/83, art. 1510 et s. du CGCT, dans les contrats entre une collectivité locale et une SEM locale il faut des clauses sur la durée, les conditions de résiliation, le sort juridique des biens en fin de contrat…Ex : Loi du 12/07/85, loi MOP : contenu du contrat de maîtrise d’ouvrage.

      Les clauses interdites :

      Règles jurisprudentielles : interdiction des clauses par lesquelles les collectivités locales s’engagent sur leurs pouvoirs de décision.

      Règles législatives/ réglementaires : relatives à des types déterminés de contrats (Loi Sapin dur les contrat de délégation de service public).

      Textes généraux : ordonnance du 04/02/59 sur les indexations qui s’applique sur tous les contrats (interdiction d’indexation sur le niveau général des prix ou des salaires), interdiction des clauses abusives, art. L 132-1 du Code de la consommation. Interdiction des clauses abusives pour les professionnels privés comme publics, directive du 05/04/93.

      § III. La personne du cocontractant.

      Y a t-il toujours un cocontractant ? Possibilité de contrats avec soi-même, c’est admis par le juge judiciaire. En droit public le contrat avec soi-même se pose dans les cas où un acte, appelé contrat, est conclu par deus personnes publiques de l’Etat ayant l’autonomie financière mais pas la personnalité morale (les ministères entre eux, les services déconcentrés).

      Constatation : dans la pratique et parfois dans la loi la conclusion de contrats entre entité non-personnalisées est courante. Depuis 1969 le ministère de l’Equipement et les DDE, en 1997 les contrats locaux de sécurité. La loi du 10/02/00 : quand EDF production veut utiliser le réseau géré par le RTE qui est une entité au sein d’EDF il faut un protocole.

      Peut-on admettre qu’il s’agisse d’actes juridiques ? Selon la doctrine un contrat suppose deux entités juridiques minimum. Les actes appelés contrat sont des simples accords (situation de fait).

      Si la loi reconnaît la portée de ces accords (loi du 10/02/00) le droit français se modifie avec la création d’une nouvelle catégorie de contrat avec soi-même quand on a des entités assez indépendantes.

       

       

        1. Les règles générales.
        2. Cocontractant personne publique ou privée.

          Possibilité de plusieurs cocontractant : contrat programmant une action de longue durée (contrat d’aide aux entreprises, collectivités locales, sécurité sociale, créanciers de l’entreprise…).

          Il est possible que le contrat soit conclu entre une personne publique et un groupement d’entreprises (cela permet de passer commande à des PME).

          Problème de la capacité du ou des cocontractant(s). Pour tous les contrats administratifs les conditions de capacité exigées sont les mêmes qu’en droit privé (pas de contrat possible avec une association non-déclarée). S’il y a une difficulté quant à la capacité d’une personne privée le juge administratif surseoit à statuer devant le juge judiciaire.

        3. Les règles particulières.

      Conditions spéciales aux MP et aux contrats de DSP. Il y a des conditions particulières d’accès (régularité aux vues des réglementations fiscales et sociales). Il arrive que de manière contestable la loi réserve à certaines personnes le droit de conclure certaines catégories de contrats : convention d’aménagement ; mandat de maîtrise d’ouvrage.

      Convention d’aménagement : une collectivité locale confie à une société la production de terrains viabilisés. Art. L 300-4 Code de l’urbanisme jusqu’à la loi SRU établissait une distinction entre les conventions d’aménagement et les concessions d’aménagement. Dans la concession le concessionnaire à des PPP particulières comme le droit d’expropriation ou de préemption. Compte tenu de ces PPP les concessions ne peuvent être conclues que par des SEM d’aménagement ou des EP d’aménagement.

      Art. 4 de la loi MOP du 12/07/85 : disposition relative à l’activité de mandataire de maîtrise d’ouvrage public. En vue d’empêcher l’abus par les collectivités locales de la délégation de maîtrise d’ouvrage.

      Ce mandat ne peut être conclu qu’avec des personnes énumérées par la loi (communes, sociétés publiques).